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Un herbier passionné de rencontres insolites, de flâneries dans l’histoire du pays et d’explorations de son patrimoine culturel.
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Salil, le potier d'Arsenal

À l’île Maurice, les préparations pour la fête hindoue Divali, la fête des lumières, commencent très tôt.

Nous l’avons découvert un jour d’hiver en août, lorsque nous avons décidé avec toute l'équipe de faire ce que nous adorons : explorer les nombreux coins que ne nous connaissons pas encore à Maurice. Ce jour là, nous avons jeté notre dévolu sur les villages d'Arsenal et de Terre Rouge, au Nord de l’île. Une occasion aussi d'aller à la rencontre des artisans de cette région.

 

Poterie et artisanat local mauricien

La bicoque peinte en jaune est visible de loin. Elle fait office de salle expo-vente. Le minuscule magasin appartient à la famille Chettiar, potiers depuis plusieurs générations.

À notre grande surprise, la boutique remplie à ras-bord de pots en tous genres, est ouverte, bien qu’il n’y ait personne à l’intérieur – ni vendeur, ni autres clients d'ailleurs. Dans la salle poussiéreuse, essayer d'entrevoir les pots à la faible lumière du jour, n'est pas une mince affaire. Il est temps d’aller à la recherche de quelqu’un qui pourrait nous renseigner.

C’est à l’intérieur de la cour que nous trouvons l’atelier de poterie. Le four est en marche. La devanture de la maison est décorée de pots en terre, à moitié finis. Toujours personne à l’horizon. Nous voyons bien quelques silhouettes à l’intérieur de la maison, mais nous n’osons pas entrer. Une des silhouettes finit par nous repérer, et vient nous saluer. C'est une vieille dame qui se trouve être la maîtresse de maison. Elle nous invite gentiment à aller voir travailler un apprenti potier au fond de l’atelier. Mais si nous voulons acheter quelque chose, elle nous propose d’aller voir son petit-fils Salil, qui tient un atelier similaire un peu plus loin, au bout de la rue.

 

Nous pénétrons dans le ventre de l’atelier, à la recherche de l’apprenti potier – en faisant bien attention à ne pas marcher sur la terre trempée qui recouvre une grande partie du sol.

Ce sont ces moments que nous aimons le plus. Se laisser surprendre par l'inattendu, et ne pas savoir sur quoi nous allons tomber.

Les pièces du fond sont remplies de diyas du sol au plafond, des milliers et des milliers de diyas. Ces petites lampes en terre cuite, que nous remplissons d'huile et dans lesquelles nous allumons une mèche à l’occasion de la fête de Divali. Certaines sont amassées sur le sol pendant que d’autres sèchent sur des étagères tout autour. La fête ne sera célébrée qu’en novembre, mais l'atelier de poterie est déjà en mode de production. C'est la période la plus chargée de l’année. 

Dans l'atelier de poterie

Ravies de notre trouvaille, nous décidons de continuer cette journée sur le thème de la poterie et nous nous dirigeons vers l’atelier de poterie de son petit-fils. Salil nous accueille, tout sourire, et nous invite à visiter son atelier et l'entrepôt.

À l’intérieur, à contre-jour, deux hommes s’activent. Même en hiver, il fait très chaud à l'intérieur de la baraque en tôle. Les artisans fabriquent des pots – petits, moyens, grands – entourés de récipients remplis de terre trempée.

 

Autour de nous, de petits pots pas encore secs remplissent toute la pièce. Ces lampes sont utilisées lors des rites de prières hindoues, les pujas. D'ailleurs, les puja shops de toute l’île viennent s'approvisionner ici.

 

Les gestes de l'artisan-potier

Quelques mètres plus loin, l’entrepôt est (sans surprise) lui aussi rempli de diyas. Les potiers sont déjà en train d'anticiper les nombreuses commandes qui vont être passées pour Divali. La matière première est un mélange de terre ramassée dans le quartier et de poussière de roche. Il est mis à tremper pour ensuite être pétri avec les pieds. Selon Salil, c'est une technique testée pendant plusieurs années et qui a fait ses preuves.

Les diyas sont façonnées à la main en utilisant un tour et sont ensuite mises à sécher dans une salle aérée. Elle seront cuites dans un four à l'extérieur. Un empilement de briques de ciment avec quelques briques spéciales à l’intérieur qui « tini saler » – retiennent la chaleur. Une cuisson optimale prend à peu près deux jours pour être obtenue et requiert une supervision constante.

Salil nous raconte que du temps de ses aïeuls, le four était entièrement constitué de briques rouges fabriquées un peu plus loin dans le village d’Arsenal.

Evolution des objets fabriqués

Comme pour chaque métier artisanal, la famille Chettiar a noté une évolution dans les objets qu’ils fabriquent. Aujourd’hui, il s’agit principalement d’objets utilisés pour les prières et les fêtes hindoues ainsi que quelques pièces de décoration. Mais dans le passé, ils fabriquaient également des produits utilisés dans la vie quotidienne comme la « gargoulette ». Un récipient qui conservait l’eau et les aliments au frais quand la plupart des gens n’avaient pas encore de réfrigérateur.

Nous avons terminé cette matinée avec des dizaines de pots, des diyas, un cendrier, et trois brûleurs d’encens, et une ferme intention d’y retourner bientôt !